Histoire de la Villa « la Feuillée »
Il serait difficile de
parler du F.A.I. sans évoquer au moins brièvement la Saga des
MARCHAL, la branche des « fabricants » comme on disait à l’époque.
A l’origine, nous avons le couple 1.-
Monsieur Ernest MARCHAL né
le 18 février 1823, Neuviller-la-Roche,67130,Bas-Rhin,Alsace,FRANCE,
décédé le 17 juillet 1915, La Broque,67130,Bas-Rhin,Alsace,FRANCE (à l’âge de 92
ans), Filateur. 2.
Mademoiselle Lina MARCHAL Mariée avec
Alfred MARCHAL Qui a donné naissance à une fratrie d’une quinzaine de membres dont j’ai la liste, mais je ne sais plus où ! D’où le sigle GMF Gédéon MARCHAL et Fils. Tous ces gens ont essaimé dans des périmètres de plus en plus grands, et n’ont pas de grand intérêt pour cet ouvrage, sauf mention au passage, bien que les personnages eux mêmes aient été dignes d’être connus, je le sais car j’ai eu ce privilège. Nous ne retiendrons pour ce récit que celui qui est resté à LA CLAQUETTE. Monsieur Ernest, comme Napoléon, était grand par son œuvre mais petit par la taille et ses ouvriers et employés le nommaient familièrement (quand il était loin) le p’tit Nénêt. Le personnage n’était pas commode, mais j’y reviendrai
Ernest MARCHAL 1865/1943
1.-Madame
Annie MARCHAL.
et
Ce coup Peu de gens entraient dans ce domaine, et ils étaient triés sur le volet. Bien sûr les invités, la famille parfois les musiciens ou l’accordeur de piano. Et le petit cercle de ceux qui voient tout et entendent tout à la cuisine, dans les chambres et dans les voitures et à qui on demande d’être propres, polis, travailleurs, d’une discrétion absolue (contrôlée) et d’être serviables sans être serviles, ce dernier point était admis par M. Ernest par besoin d’être informé, mais très peu apprécié, car le quidam était classé « agent double » Je reprends donc mon récit
à la galerie construite un peu plus tard, mais dans la foulée. Il
s’agissait en fait d’un salon de musique et d’exposition qui était
splendide et dont M. Ernest était très fier. Sans doute avait-il remarqué
que cet ensemble magnifique à tous les points de vue avait fait sur « le
petit gamin de chauffeur que j’étais » l’effet d’un coup de marteau sur la
tête. Lui, qui ne manquait pas de gens prêts à chanter ses louanges, a dû
être flatté, car moi j’avais le souffle coupé. Il m’a montré le piano
PLEYEL de concert et au fond de la pièce, l’orgue. Puis il m’a promis que
nous y reviendrions. Partout où il y avait de la place autour de la pièce,
ce n’étaient que tableaux et vitrines dorées avec des verres biseautées
qui reflétaient dans tous les sens des rayons aux couleurs de l’arc en
ciel dès qu’il y avait un rayon de soleil. M. Ernest avait une sœur, (Fanny (1872-1948); archéologue enragée qui avait cherché au Donon un tas de vestiges gallo-romains qui trônaient dans les vitrines de son frère. C’était ça la galerie. Une vitrine pour Madame Fanny LACOUR, épouse d’industriel de Sainte Marie aux Mines (sœur d’Ernest). Lorsqu’il allait (souvent) dans la galerie, M. Ernest relevait à chaque fois un appareil de mesure « pour mesurer l’humidité » disait-il. J’ai compris plus tard qu’il s’agissait d’un hygromètre dont on trouvait différents modèles dans les tissages et filatures. Et pourquoi cet appareil ? Car cette partie d’immeuble était déjà à l’époque équipée d’un dispositif peut-être primitif, mais diablement efficace qu’on appellerait aujourd’hui climatisation à absorption. Cette merveille très en avance sur son temps a malheureusement disparu au cours des travaux de modification des bâtiments. Subsistent seules les grilles d’aération en bronze dans le sol du grand salon de musique, mais dès qu’on parle de technique, j’oublie les personnages. Voilà qui va intéresser M. ATZENHOFFER : Le couple Ernest MARCHAL / Emma DIEHL a eu deux filles ! Annie, devenue plus tard Mme Alfred LUTZ par son mariage avec un agent commercial. Le couple a eu trois enfants : Robert, Jean-François et Yvette que nous retrouvons dans l’histoire du F.A.I. La deuxième fille, Renée, devenue Mme BRICKA par son mariage avec un avocat originaire de Bischwiller et que nous appelions Mme Renée parce qu’elle nous l’avait demandé en toute simplicité, a eu des déboires conjugaux et ce devait être vers 1939/40 car j’ai lu un extrait du jugement de divorce écrit en allemand. Mme Renée a eu une fille, Annette BRICKA, qui doit avoir à peu près mon âge, mais que je n’ai plus vue depuis soixante ans. Cette fille était un modèle de douceur et de gentillesse avec le personnel qui l’adorait. Elle se nomme maintenant Mme Jacques BARRAL la mère de Laurent et de Sylvie épouse BALY. A ce stade, nous n’avons évoqué qu’une petite partie de l’immense ramure de l’arbre généalogique MARCHAL qui ressemble assez au gros chêne du Salm. En fait la partie qui touche « LA FEUILLEE » Mais il y a une branche que j’aimerais encore évoquer bien qu’elle ne touche pas directement le F.A.I. seulement par ricochet.
Paul MARCHAL 1851/ 1912
frère de
M. Ernest Étaient les parents d’un autre MARCHAL très connu
Pierre MARCHAL
1888/ 1951 marié
avec Mais bien entendu de la
sœur de Monsieur Pierre, Mme Aimée MARCHAL, mariée
avec le Professeur Alfred KLEINKNECHT, chirurgien et directeur de
l’hôpital du Hasenrain à MULHOUSE.(photo de leur mariage dans l'ESSOR)
Le Professeur et Madame
ont eu un fils, Jean KLEINKNECHT né en 1908 qui a été à l’école de
ROTHAU, puis à MULHOUSE et enfin à l’École Nationale Supérieure de Textile
d’où il est sorti Ingénieur avant d’aller compléter sa formation au
Polytechnikum de Zurich avec un deuxième diplôme d’Ingénieur, mais cette
fois d’électricien. Ça promettait pour moi, mais je n’en savais encore
rien. Quatre voitures à entretenir et à conduire, il y avait de quoi faire pour mon père car moi à sept ans, j’étais juste bon pour la peau de chamois ou pour tenir les queues de soupapes. Mais c’était déjà ça, car une troisième main, même petit ça peut rendre service, bien entendu avec l’autorisation de Monsieur ! Et ça évite de chercher un mécanicien à l’usine. Et un gamin, ça se faufile partout et les patrons comme les bonnes ne manquaient pas de me solliciter pour me glisser là où eux ne passaient pas. Étonnez-vous après ça qu’on vous dise que je connais bien la maison. Et malgré sa réputation d’ogre, Monsieur Ernest ne m’a adressé, au début en 1936 qu’une petite réprimande (méritée) mais pour un motif si futile…. J’étais vexé jusqu’au trognon parce qu’il m’avait fait cette remarque devant ses filles. Mais ça ne s’est jamais plus reproduit. ! Il a toujours été très gentil avec moi. Je sais que peu de gens l’ayant connu (Il en reste peu) tiendraient le même langage que moi, mais je n’y peux rien ! Les années passèrent. Vint la crise et la guerre……. Dans la chanson, ça sonne bien, mais dans la vie, c’est plutôt triste. Le 2 septembre 1939, mon père partait, mobilisé. Désormais, je n’avais plus rien à faire à LA FEUILLEE. Mais quand je rencontrais Monsieur Ernest dans la rue, je soulevais mon béret et malgré sa mauvaise vue, il ne manquait jamais de m’adresser de la main un petit signe amical. Et puis, un jour de 1940, désireux sans doute de mettre un peu d’espace entre les Allemands et lui, il disparut vers la « France de l’intérieur » Je ne le revis plus jamais, pas plus que lui ne revit sa si jolie maison. A partir de là, les
événements se précipitèrent et on vit défiler dans la maison des gens qui
visiblement n’avaient rien à y faire et d’autres qui y étaient en mission.
On put même voir, chose étrange, un ouvrier de l’usine se promener dans
le canton avec la somptueuse CADILLAC, 45 CV fiscaux, 32 litres aux 100 km
( 200 000 Frs) c’est assez dire la pagaille qui accompagne les conflits. La
villa fut réquisitionnée par l’occupant et le contenu mis aux enchères par
le notaire de Schirmeck. Et au milieu du fourbi mons Étrange spectacle que celui de ces gens qui regardaient les biens de leurs patrons, certains par curiosité, d’autres avec indifférence, ou encore avec tristesse. D’autres encore qui semblaient jubiler, dérisoire revanche sur la différence de statut social ! La scène est un peu floue, mais bien présente dans ma mémoire où elle restera.
Une fois vidée et
nettoyée, la maison fut bientôt prête pour abriter le commandant du Camp
SS du Struthof Joseph KRAMER avec sa garde et son secrétariat. Inutile de préciser que les
passants ne s’attardaient pas devant la grille où veillait une garde
permanente. L’endroit était malsain et personne n’avait envie d’en savoir
davantage sur ce qui se passait à l’intérieur.
( Josef Kramer Arrêté le 17 avril 1945 à
Bergen-Belsen. Jugé au cours du procès de Lunebourg, en zone d'occupation
britannique, jugement de la garnison SS de Bergen-Belsen qui s'ouvre le 17
septembre 1945 En 1943, nous avons appris avec tristesse et émotion, le décès de Monsieur Ernest. Sa disparition allait changer pas mal de choses dans la famille et les usines. Mais n’anticipons pas. En attendant, la guerre traînait en longueur et j’avais quatorze ans. Faute de faire des études, car il aurait fallu que je parte outre Rhin, le Patron par intérim dont mon père était toujours chauffeur entre deux voyages en car ou en camion accepta de me prendre comme apprenti électricien. C’est ce poste que j’occupais lors du grand chambardement des Américains venant d’Azerailles, tandis que les Français venaient de Wasselonne. Après les émotions de la libération, le premier haut personnage de l’usine à se pointer au bureau de La Claquette fut Monsieur Alfred LUTZ en uniforme de Commandant avec Jeep et chauffeur. Sans doute avait-il un statut spécial, car il revient les jours suivants, en Simca 5, et sans chauffeur, mais toujours en uniforme et avec une canne car il avait été blessé. Tout de suite après vint Monsieur Pierre puis les exilés, les expulsés et les fugitifs rentrèrent au bercail. Joie de se retrouver en famille, tristesse en évoquant ceux qui ne reviendraient pas. La vie reprenait un cours à peu près normal. Je ne tiens pas à disserter sur l’héritage de Monsieur Ernest MARCHAL, parce que ça ne me regarde pas, mais il faudra bien aborder le sujet. Dans les usines, le problème avait été réglé par les Conseils d’Administration respectifs des deux groupes GMF et SD qui étaient deux entités différentes avec les mêmes dirigeants. Pour le privé, la Villa de Monsieur Ernest devait échoir à M et Mme Alfred LUTZ chez qui vivait Madame Ernest MARCHAL (Emma DIEHL) et où elle s’éteignit en 1949. Quant à la VILLA, elle fut occupé successivement par différents cadres de l’usine GMF et par Madame LHEUREUX née Yvette LUTZ (petite fille de Ernest MARCHAL) mais je ne sais pas dans quel ordre. Et le 29 mai 1965, la Villa « La Feuillée » devient le F.A.I ou Foyer d'Amitié InternationaleCENTRE INTERNATIONAL DE SÉJOUR Récit de Hubert HOLVECK Le 9 janvier 2008 Voir: Le développement de l'industrie textile dans la vallée de la Bruche |